Pour exercer l'activité de courtier immobilier

Notaires et avocats doivent être « dans l’exercice de leurs fonctions »... ou titulaires d’un permis délivré par l’OACIQ

Note : Le présent article fait référence à des jugements rendus entre 2004 et 2012, à une époque où l’ancienne Loi sur le courtage immobilier (L.R.Q. c. C-73.1) et ses règlements étaient en vigueur. En conséquence, le texte qui suit fait référence au vocabulaire applicable à cette époque. L’analyse qui suit demeure toutefois pertinente sous la Loi sur le courtage immobilier (L.R.Q. c. C-73.2) entrée en vigueur le 1er mai 2010 et mise à jour le 13 juillet 2018 après l’adoption du projet de loi n° 141.

Les notaires et les avocats ne peuvent se livrer à une opération de courtage qu’à l’occasion et accessoirement, dans le cadre d’un mandat qui leur a été confié par un client en leur qualité de notaire ou d’avocat. C’est ce qui ressort d’un jugement de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale de 2004 relativement à quatre dossiers où l’ACAIQ poursuivait deux notaires pour exercice illégal de l’activité de courtier immobilier (1).

Les poursuites pénales leur reprochait essentiellement d’avoir agi de manière à laisser croire qu’ils étaient autorisés à exercer l’activité de courtier immobilier, notamment en faisant signer des contrats leur confiant le mandat exclusif et irrévocable d’agir comme intermédiaires pour la vente d’immeubles, et ce, contre rétribution. Il était également reproché à l’un d’entre eux d’avoir agi de manière à laisser croire qu’il était autorisé à exercer l’activité de courtier immobilier, en exigeant une rétribution qui était prévue au contrat visant la vente de l’immeuble, dans le cas où une location surviendrait pendant la durée du contrat.

Lors des audiences, il n’était pas contesté que les notaires poursuivis étaient dûment inscrits au tableau de la Chambre des notaires ni qu’ils ne détenaient aucun certificat de courtier ou d’agent immobilier délivré par l’ACAIQ. Il était également admis que les gestes reprochés aux notaires étaient visés par l’article 1 de la Loi sur le courtage immobilier (2) (maintenant les articles 1.1 et 3.1 de la LCI).

Toutefois, les notaires soutenaient ne pas être soumis à la loi, puisqu’ils bénéficiaient de l’exception prévue à son article 2 (maintenant l’article 3 de la LCI) qui prévoyait, en effet, que ne sont pas soumis à son application, les avocats et les notaires qui, dans l’exercice de leurs fonctions, se livrent à une opération de courtage. Le débat a donc porté sur l’interprétation de cet article, et particulièrement sur le sens de l’expression « dans l’exercice de leurs fonctions ».

Dans le cadre de son analyse, le juge a fait appel à l’historique législatif et aux principes d’interprétation des lois. Il a également examiné l’ancienne et la nouvelle Loi sur le notariat (3) ainsi que la Loi sur le courtage immobilier applicable avant 1994 (4). Avant cette date, la loi prévoyait un régime d’exception pour les avocats et les notaires « en exercice ». De l’avis du juge, la notion « en exercice » faisant référence au simple fait pour un professionnel d’être inscrit au tableau de son ordre, diffère de l’expression « dans l’exercice de leurs fonctions » prévue sous la Loi sur le courtage immobilier.

D’autres facteurs, dont les débats parlementaires entourant l’adoption de la Loi sur le courtage immobilier, ont amené le juge à confirmer que la nouvelle disposition se voulait plus limitative que l’ancienne.

Selon le juge, l’expression « dans l’exercice de leurs fonctions » signifie tout simplement « dans le cadre de l’exercice habituel des fonctions de notaire ou d’avocat ». Ainsi, l’opération de courtage ne doit pas être l’aspect essentiel ni initial du mandat donné au notaire.

Dans les quatre dossiers en cause, il y a eu absence de preuve d’un mandat notarial autre que celui de vendre un immeuble, ce qui aurait pu permettre accessoirement aux notaires de procéder à la vente des immeubles en cause. L’exception prévue à l’article 2 de la Loi sur le courtage immobilier (maintenant l’article 3 de la LCI) n’a donc pu trouver son application. Il a ainsi été établi hors de tout doute que les notaires avaient exercé l’activité de courtier sans être titulaires d’un certificat délivré par l’ACAIQ, dans des circonstances où ils n’étaient pas « dans l’exercice de leurs fonctions de notaires ». La Cour les a donc déclarés coupables des infractions reprochées. Malgré un avis d’appel logé par un des notaires concernés invoquant l’erreur du juge dans son interprétation de l’exception prévue à l’article 2 de la Loi sur le courtage immobilier (maintenant l’article 3 de la LCI) applicable aux moments des infractions, les verdicts de culpabilité ont été maintenus (4).

Pour toute question, n’hésitez pas à communiquer avec le centre de renseignements Info OACIQ.

(1)  Association des courtiers et agents immobiliers du Québec c. Hudon, C.Q., Mingan, 650-61-002355-034 et 650-61-002354-037, 16 août 2004, j. De Pokomándy et Association des courtiers et agents immobiliers du Québec c. St-Pierre, C.Q., Mingan, 650-61-002391-039 et 650-61-002392-037, 16 août 2004, j. De Pokomándy.

(2)  L.R.Q., c. C-73.1.

(3) L.R.Q., c. N-2 et L.R.Q., c. N-3. 4 L.R.Q., c. C-73

(4) Hudon c. Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, 2005 CanLII 8105 ( C.S.).

Dernière mise à jour : 30 octobre 2020
Numéro d'article : 122365