Prise de paiement en cas de seconde hypothèque
Reprenons l’exemple d’une banque qui a consenti un prêt hypothécaire de 200 000 $ pour un immeuble d’une valeur 325 000 $, et pour lequel il reste encore 160 000 $ à payer.
Si Jean-Pierre avait déjà payé plus de 100 000 $, la banque devrait obtenir l’autorisation du tribunal.
Qu’arriverait-il si Jean-Pierre, tout en ayant encore 160 000$ à rembourser, avait, avec une autre banque, une seconde hypothèque d’une somme de 30 000 $ sur son immeuble?
- 1re banque 160 000 $
- 2e banque 30 000 $
- Valeur actuelle 325 000 $
La 2e banque (qui est créancière hypothécaire subséquente) peut, dans le délai imparti pour le délaissement, exiger que la 1re banque abandonne la prise en paiement et qu’elle procède elle-même à la vente du bien ou le fasse vendre sous contrôle de justice.
Pourquoi la 2e banque exigerait-elle cela?
Parce que l’article 2783 du Code civil du Québec indique que :
« Le créancier qui a pris le bien en paiement en devient le propriétaire, à compter de l’inscription du préavis. Il le prend dans l’état où il se trouvait alors, mais libre des hypothèques publiées après la sienne. […] »
La 2e banque a tout intérêt à agir puisque l’inscription de son hypothèque ayant été publiée après celle de la 1re banque, elle perdra sa sûreté si celle-ci utilise ce recours. Il ne lui restera alors qu’un recours personnel contre le débiteur.
L’article 2780 du Code civil du Québec énonce que :
« Le créancier requis de vendre doit procéder à la vente, à moins qu’il ne préfère désintéresser les créanciers subséquents qui ont inscrit l’avis ou, si l’avis a été inscrit par le débiteur, que le tribunal n’autorise le créancier, aux conditions qu’il détermine, à prendre en paiement. À défaut par le créancier d’agir, le tribunal peut permettre à celui qui a inscrit l’avis exigeant la vente, ou à toute autre personne qu’il désigne, d’y procéder. »
Dans notre exemple, la 1re banque pourrait décider de payer la 2e banque pour la désintéresser.
« Lorsqu’il n’a pas été remédié au défaut ou que le paiement n’a pas été fait dans le délai imparti pour délaisser, le créancier prend le bien en paiement par l’effet du jugement en délaissement, ou par un acte volontairement consenti par celui contre qui le droit hypothécaire est exercé, et accepté par le créancier, si les créanciers subséquents ou le débiteur n’ont pas exigé qu’il procède à la vente […]1.
En résumé au sujet de la prise de paiement
« Le jugement en délaissement ou l’acte volontairement consenti et accepté constitue le titre de propriété du créancier »2.
Conséquemment, un courtier peut signer un contrat de courtage avec le créancier hypothécaire qui, à ce moment-là, sera devenu le propriétaire de l’immeuble. Le courtier doit obtenir et conserver au dossier le jugement en délaissement forcé ou l’acte constatant le délaissement volontaire, ce qui constitue les titres de propriété de l’immeuble.
Ce recours hypothécaire est pertinent lorsqu’il y a de l’équité sur l’immeuble. Lorsque le créancier pense que la vente de l’immeuble ne lui rapportera pas assez pour couvrir la créance, il privilégiera un autre recours.
1 Art. 2781 C.c.Q.
2 Art. 2781(2) C.c.Q.